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Construction bas carbone : une première étape bien franchie

Futur quartier Chapelle Charbon © ArtefactoryLab

Au stade des permis de construire, les projets architecturaux des lots de la ZAC Chapelle Charbon étaient bien alignés sur ses objectifs ambitieux en termes de performance et de matériaux bio-géosourcés. Cinq acteurs impliqués dans le processus de conception témoignent : cette expérience a marqué une étape dans leur approche de la décarbonation de la construction.

Pour la ZAC Chapelle Charbon, à Paris 18e, P&Ma a mis l’accent, entre autres ambitions, sur la réduction de l’empreinte carbone des bâtiments grâce à un recours intensif aux matériaux biosourcés ou géosourcés. Cette orientation traduit notamment l’engagement de l’aménageur dans la préfiguration des ambitions du PLU bioclimatique et vis-à-vis de la filière bois francilienne, officialisé par sa signature du Pacte Bois Biosourcés en novembre 2020.

Concrètement, sur le plan quantitatif, les bâtiments et notamment les 6 lots de logements doivent respecter ces 2 prescriptions  : 
-    l’atteinte de l'indice Ic_construction RE2025
-    40 kg de matériaux biosourcés par m2 de SDP sur 50 % de la SDP 

Rappelons que dans la cadre de la nouvelle règlementation RE2020, l’indice Ic_construction, exprime les émissions de carbone par m2, et est calculé sur le cycle de vie du bâtiment. Il indique un budget carbone à ne pas dépasser. L’indice réglementaire diminue par étape : 2022, 2025, 2028 et 2031. Le choix du seuil 2025, qui est volontariste, écarte de facto les projets 100 % béton (structure et murs porteurs). 

En vue des concours/consultations d’architecture, l’agence h2o architectes (du groupement de maîtrise d’œuvre urbaine avec BASE mandataire), l’AMO carbone climat Atelier Franck Boutté, l’AMO construction géo/biosourcée Laurent Mouly Ingénierie, l’économiste BMF et le préventionniste en sécurité incendie Casso & Associés ont élaboré une étude inédite préfigurant des emplois possibles de matériaux bio et géosourcés dans les futurs projets (Lire : Construction bas carbone : baliser le champ des possibles). 
En conception, des ateliers réunissant les équipes de l’ensemble des lots ont permis de nombreux échanges sur l’emploi de ces matériaux avec différents experts (incendie, réemploi, pierre, laboratoires, etc.).  

Au stade des permis de construire, présentés en février 2024, les modes constructifs ambitieux qui avaient été présentés lors des concours ont été approfondis et leurs performances confirmées : tous les projets atteignent l’Ic_construction RE 2025. Les lots A, D et F font même mieux en atteignant le seuil 2028 (analyse réalisée sur PC en février 2024). L’objectif Bbiomax-20% (qui traduit la performance énergétique du bâtiment) et le ratio de masse de matériaux biosourcés par m2 sont atteints par tous les lots ou dépassés. 

Ces performances sont le fruit de stratégies différentes, chaque projet « testant » son propre chemin :

-    Lot A : structure verticale béton, dalle mixte bois-béton, façade à ossature bois et paille hachée
-    Lot B1 : structure mixte, façade pierre naturelle autoporteuse au nord et façade à ossature bois laine de bois au sud 
-    Lot B2 : structure mixte, plancher traditionnel (solives bois et béton de chaux), façade pierre naturelle autoporteuse au nord et façade à ossature bois chanvre au sud
-    Lot C : façades nord, sud et refends pierre naturelle
-    Lot D : structure verticale béton, plancher traditionnel (solives bois et béton de chaux) et mur rideau épine bois
-    Lot F : structure bois et façade à ossature bois et isolation laine de bois

À l’étape PRO-DCE, les performances restent à valider par les calculs, puis à confirmer avec les réponses des entreprises, qui doivent être consultées au 2e semestre 2024. Ces premiers résultats n’en sont pas moins très encourageants. Aussi avons-nous souhaité recueillir le témoignage de plusieurs acteurs mobilisés sur ces projets.

•    Antoine Santiard, architecte et Franck Boutté, consultant, reviennent dans leur interview sur l’intérêt particulier de l’étude qu’ils ont réalisée et fournie aux équipes de concepteurs en 2022, ainsi que sur la conception des projets aidée par un travail collectif en ateliers. Le contexte (réglementation, filières) a beaucoup évolué en deux ans, à quoi l’opération Chapelle Charbon n’est peut-être pas complètement étrangère. Lire l'entretien

•    Claire Curtil, cheffe de projet de la RIVP (lots A et C), raconte comment maître d’ouvrage et maîtres d’œuvre ont travaillé à respecter les engagements pris au stade des concours. Elle constate que les prescriptions architecturales, les modes constructifs et les performances environnementales sont tellement imbriqués que la gestion de projet est appelée à évoluer dans un proche avenir. Lire l'entretien

•    Stéphanie Bru et Adrien Meuwly, architectes du lot D, constatant l’irruption d’une économie du carbone parallèle à l’économie financière, ont adopté une stratégie générale de réduction éclairée de la matière dans la logique de l’étude « boite à outil » susmentionnée. Adeptes du calcul de précision, ils s’enthousiasment pour l’hybridité et l’innovation dans l’assemblage de multiples matériaux biosourcés, avec une dose de préfabrication. Lire l'entretien